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  • Grégoire Jeanmonod

Famille dysfonctionnelle


Depuis quelques jours, LinkedIn n'est plus le même. De réseau professionnel il est devenu agora politique. Et ça peut se comprendre.


Moi-même, je peine à me poser devant mon PC pour rédiger un post sur des notions de management ou de créativité. Les enjeux sont trop grands : ce serait comme parler de l'aménagement des cabines à bord du Titanic.


Pour autant, je ne me mêlerai pas ici de politique. Je n'ai ni la légitimité ni le savoir nécessaires. Et il me semble qu'incriminer tel parti ou dirigeant est contre-productif. En incorrigible rousseauiste, je suis convaincu qu'on peut combattre les idées sans haïr ceux qui les portent.


Mais je ne renonce pas à penser que l'art est à la hauteur des enjeux présents.


Je suis retombé dans ma bibliothèque sur le catalogue d'une exposition photo qui a marqué l'histoire.


En 1951, le photographe Edward Steichen, alors directeur du département photo du MoMA à New York, s'est mis en tête d'organiser une exposition hors norme. L'idée : réunir des images venues du monde entier capables de montrer l'universalité des émotions, désirs et espoirs de l'espèce humaine. "La photographie, disait-il, est un formidable moyen d'expliquer l'homme à l'homme."


Pendant 4 ans, avec son équipe, il a cherché, trié, sélectionné parmi des millions de clichés ceux qui pourraient composer un "portrait de l'humanité".


Le résultat, c'est une exposition au titre magique : The Family of Man. 503 photos venues de 68 pays, qui mettent en scène la diversité de nos mœurs et la proximité de nos âmes.


Inaugurée au MoMA en 1955, l'expo a ensuite été transportée dans 160 musées et visitée par plus de 10 millions de spectateurs. Elle est aujourd'hui installée de manière permanente à Clervaux, au Luxembourg.


Bien sûr, on pourra reprocher à Steichen d'avoir privilégié dans sa sélection des photographes américains, et voir dans son projet un subtil outil de propagande.


Mais on ne m'ôtera pas de l'idée qu'appeler, en pleine Guerre Froide, à la cohésion de notre grande famille est une démarche plus que louable.


Aujourd'hui, alors que les peuples se déchirent, que les nations s'affrontent et que les extrémismes prospèrent, ces images nous rappellent que toute guerre est fratricide, que la xénophobie est absurde et que la violence est contraire à la civilisation.


Notre famille, de toute évidence, est dysfonctionnelle. Elle l'a toujours été. Il serait temps pour nous tous de trouver une thérapie efficace.


La politique est un champ de bataille.

Le commerce, autrefois vecteur de paix, en est devenu un autre.

Quant à la religion, il semble qu'elle divise plus qu'elle ne rassemble.


Il nous reste l'art.


On me trouvera naïf. Mais puisqu'il est l'heure de choisir un camp, je choisis celui de la candeur. C'est un luxe, certes. Mais c'est peut-être le seul auquel nous ne devrions pas renoncer.



Photos: Gotthard Schuh, Garry Winogrand, George Silk

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