Publier des photos de nus sur un blog à vocation professionnelle est assez peu commun. Et pourtant...
Ces images sont l'oeuvre du photographe britannique Bill Brandt.
Dans les années 50, alors qu'il s'était fait un nom dans le portrait et la photo documentaire, il a décidé de se consacrer au nu artistique.
Pas très original, me direz-vous. Sauf que Brandt, c'est le genre de type qui aime bien faire les choses "à sa manière". On oublie les odalisques langoureusement allongées et la lingerie soulignant des courbes tentatrices: d'autres ont fait ça mille fois avant lui, avec une élégance et un talent inégaux.
Brandt, ce qu'il cherche, c'est la poésie.
Et alors qu'il se promène sur le littoral de la Manche, les plages de galets lui donnent une idée. Il va faire du gros plan. Et photographier des corps comme d'autres photographient des fleurs : de très, très près.
Le résultat, vous l'avez sous les yeux. Ici un genou, là une épaule, ailleurs une aisselle ou une hanche... En noir et blanc, la peau se fait minérale. Ses aspérités se confondent avec celles des galets, son duvet avec le grain de la photo argentique.
Montrés sans intention d'aguicher ou de provoquer, ces fragments de corps ont perdu leur charge érotique... mais pas leur beauté formelle. Au contraire: ils deviennent beaux non plus comme les parties d'un tout, mais comme des objets - et sujets - indépendants.
Au delà de toute appréciation esthétique, ces images nous rappellent que tout élément d'un ensemble prend une dimension particulière quand il est observé indépendamment des autres parties.
Vous me voyez venir ? Pensons à nos entreprises...
Une équipe est un tout, une entité qui a son histoire, ses objectifs, ses difficultés. Et chacun de ses membres, naturellement, doit adopter les codes du groupe pour servir les intérêts communs. C'est indispensable.
Mais le risque serait de sacrifier les qualités individuelles à l'orthodoxie de l'ensemble. D'oublier qu'avant d'être ingénieur, commercial ou chef de projet, chaque collègue est une personne riche d'une expérience, d'une intelligence et d'une sensibilité propres.
Faisons l'effort, quand les enjeux du collectif se font moins pressants, de prêter attention aux individus qui le composent. A leurs aspirations, à leurs ambitions, à la force de leurs idées et à la poésie, pourquoi pas, qu'ils portent en eux... En bref: à ce qu'ils ont de plus précieux à offrir.
C'est ainsi qu'on créera un environnement où chacun, loin de l'impression d'être un pion interchangeable, sera valorisé dans sa singularité plutôt que pour sa seule capacité à se conformer à sa fonction.
Si un genou est plus qu'une articulation, n'oublions pas qu'un collègue ne se résume pas à sa fiche de poste.