L'Anglais Nick Brandt est un photographe engagé.
Son territoire, c'est l'Afrique. Son sujet, la faune sauvage. Et son but, c'est de nous sensibiliser au sort des créatures avec lesquelles nous partageons la planète. Ses photos dénoncent de manière aussi poétique que dramatique le braconnage et la disparition programmée des écosystèmes naturels.
Mais il se garde bien d'opposer l'humain et l'animal. Dans sa série intitulée The Day May Break, en 2020, il fait poser des hommes, femmes et enfants, autres victimes de l'industrialisation anarchique, aux côtés d'animaux dont la survie est menacée.
Pour citer le philosophe Pete Singer, "Nick Brandt photographie les animaux non comme des subalternes, mais comme des camarades."
Pourtant, Brandt n'a pas n'a pas fait ça toute sa vie.
Jusqu'aux années 2000, il était réalisateur de clips pour des superstars de l'industrie musicale : la chanteuse Jewel, le compositeur Moby, l'immense Michael Jackson... Sauver la planète n'était pas vraiment dans la fiche de poste.
Mais en 1995, il se rend en Tanzanie pour tourner le clip de la chanson de Michael Jackson Earth Song. Vous vous souvenez ? Le Roi de la Pop errant dans une forêt en cendres alors que défilent des images d'arbres abattus et d'éléphant trucidés.
Pour Brandt, c'est le coup de foudre. Avec le continent africain, et avec la faune sauvage. Sa vie bascule : il renonce au show-business pour se consacrer au monde animal.
La vocation est belle. Mais ce qui m'interpelle ici n'est pas tant la nature de son engagement que la forme qu'il a prise. Parce que Nick Brandt a su capitaliser sur ses acquis pour s'investir dans une mission nouvelle.
Dans son premier job, il avait appris à créer une atmosphère visuelle, composer des images, éclairer une scène, choisir un décor, régler des instruments optiques et diriger des équipes.
C'est ce talent-là qu'il a mis au service de son nouveau combat en devenant photographe. Il ne s'est pas improvisé biologiste ou ranger : il a compris qu'il serait plus utile en s'appuyant sur son expérience propre.
Comme lui, nous avons nos convictions et nos indignations. Et si nous renonçons à défendre les causes qui nous tiennent à cœur, c'est souvent parce que nous nous sentons incapables de les servir efficacement.
Mais c'est oublier que notre expertise peut s'exprimer de mille manières.
Partons donc de ce que nous savons faire, et demandons-nous comment cette compétence peut contribuer à l'avènement d'un futur désirable.
Car si le monde doit changer, il a besoin pour ça de gens qui savent compter, construire, éduquer, vendre, organiser, manager, gérer, inventer, négocier, écrire, former, soigner... Votre talent, quel qu'il soit, ne sera jamais mieux employé.
Et si le sort des rhinocéros vous importe peu, choisissez donc une autre cause : il y en a tant qui méritent d'être défendues.